Le Gouvernement wallon a approuvé un décret contenant de nouvelles mesures fiscales qui impactent le paiement des droits de succession, notamment d’un point de vue du don manuel.
La Région wallonne souhaite en effet allonger le délai de survie inhérent au don manuel non enregistré, passant dès lors de 3 à 5 ans.
Explications.
Région wallonne : vers un délai de survie allongé pour un don manuel non enregistré ?
Quand il est question de droits de succession en Belgique, il existe un outil de planification successorale très attrayant fiscalement : le don mobilier, qu’il soit enregistré ou non enregistré.
Tout résident fiscal belge a en effet tout à fait le droit de faire un don mobilier (argent, bijoux…) à une ou plusieurs personnes sous le couvert d’une fiscalité – très – souple. Et ce, sans aucune limite de montant !
Le don peut être effectué sans enregistrement et de façon totalement gratuite, ou alors, il peut être enregistré et dès lors soumis à une taxe.
Droits de succession en Wallonie : quelle taxe pour une donation déclarée ?
La taxe pour un don en ligne directe (enfants, petits-enfants, époux, cohabitants légaux) en Région wallonne est à hauteur de 3,3%. Elle est de 5,5% pour un don vers toute autre personne.
Attention : les taux de taxation sont légèrement différents en Région flamande et en Région de Bruxelles-Capitale : 3% en ligne directe et 7% vers toute autre personne pour Bruxelles ; 3% en ligne directe, y compris vers un cohabitant de fait (cohabitant effectivement depuis plus d’un an) et 7% vers toute autre personne pour la Flandre.
Droits de succession en Wallonie : quelle taxe pour une donation non déclarée ?
Une donation non enregistrée se fait gratuitement ! Aucune taxe n’y est liée.
Cependant, cette donation gratuite – ou donation à 0% – est assortie d’une condition de survie pour le donateur. En effet, ce dernier doit survivre actuellement au moins 3 ans à dater du jour de la donation. Dans le cas contraire, le donataire devra s’acquitter de droits de succession sur la valeur du don comme s’il s’agissait d’un legs.
Et c’est précisément cette condition de délai de survie qui est visée par le nouveau décret wallon : le donateur devra survivre non plus 3 ans, mais bien 5 ans à dater du jour de la donation s’il veut préserver le donataire de droits de succession.
Objectif : augmenter les donations enregistrées
L’objectif de cette mesure est simple : amener les donateurs à choisir la sécurité fiscale et à déclarer le don.
Aujourd’hui, rien n’est précisé concernant l’entrée en vigueur de cette nouvelle règle, ni sur une éventuelle rétroactivité.
Les donations faites durant ces 3 dernières années vont-elles voir leur échéance prolongée ? D’après le cabinet du ministre wallon des Finances, il semble que toutes les donations dont le délai de 3 ans ne serait pas encore acquis au 1er janvier 2022 verraient leur délai prolongé de 2 ans, pour un total de 5 ans. Il est probable que des mesures transitoires soient prises… Affaire à suivre donc.
Aucun changement de taxe pour les droits de succession
De notre côté, cette nouvelle reste plutôt positive.
Si les professionnels du secteur ont tendance à parler d’une nouvelle mesure « fiscale », en réalité la fiscalité des donations mobilières n’est absolument pas remaniée. Seul le délai de survie lié à un don non enregistré est augmenté, et non pas les taux des droits de donation.
La Belgique reste donc un pays souple en matière de planification successorale, les donations mobilières gratuites restant autorisées et les donations enregistrées demeurant taxées entre 3% et 7%.
À titre de comparaison, nos voisins français ne permettent qu’une exonération de droits de donation à concurrence de maximum 100.000 € (par parent, et par enfant) tous les 15 ans. Au-delà des 100.000 €, les taux sont nettement supérieurs à notre taux marginal de 5,5% en Région wallonne : 20% en ligne directe pour des dons entre 15.000 et 550.000 €, 30% jusqu’à 1 million, et jusqu’à 45% au-delà.
Le décret ne vise pas non plus à plafonner le montant que l’on peut donner. Celui qui souhaite donner les 225 millions d’euros gagnés à l’EuroMillions à son voisin peut toujours le faire sans frais (selon le délai de survie) ou les donner avec un enregistrement de maximum 5,5% en Wallonie.
Comment atténuer le risque de taxation lié au délai de survie plus long ?
Deux moyens permettent d’atténuer le risque de taxation lié à l’allongement du délai de survie :
1. Un donateur dont la santé se dégrade entre la donation et la 5e année peut procéder à l’enregistrement de sa donation de manière rétroactive en payant simplement la taxe d’enregistrement adéquate. Cela a pour effet de sceller définitivement le don aux yeux de l’Administration et ainsi d’éviter au donataire de payer un impôt successoral sur cette donation en cas de décès prématuré ;
2. Il est possible de souscrire une « assurance décès » ou « assurance droits de succession » couvrant, sur une période de 3 ans (ou 5 ans), le montant des droits de succession dus sur le don en cas de décès du donateur durant cette période. La prime à payer est bien souvent moins élevée que les 3,3% ou 5,5% qu’il aurait fallu payer pour enregistrer le don initialement.
Pensez à planifier votre succession !
Ce n’est jamais simple d’aborder un tel sujet, mais pensez-y : il est primordial de planifier sa succession assez tôt si l’on veut envisager l’avenir sereinement et prémunir ses proches.
Certains patrimoines constitués d’actifs mobiliers ont un intérêt certain à passer par le don mobilier. Même si le délai de survie discuté se voit prochainement allongé, le don mobilier en lui-même reste fiscalement intéressant.
La portée de cette nouvelle mesure est donc relativement limitée. Toutefois, cela suppose que le sujet est sur la table des politiques et que cette fiscalité pourrait encore évoluer dans le futur et devenir moins attractive.
Il vaut donc mieux passer certaines portes aujourd’hui, avant qu’elles ne se ferment ! Et il n’est pas exclu que cette nouvelle mesure wallonne donne des idées à la Région bruxelloise…